[Gastronomie] Ajinomoto : rencontre avec la cuisine au dashi
Avant le dashi au Japon, existait simplement le miso. Et avant celui-ci le hishio, et tous types de bouillons ou marinades en provenance de Chine, où cela dominait. Des anciens échanges culturels entre le Japon et la Chine il y a de cela plusieurs siècles ont mis en avant des écrits qui le mentionnent. Ce hishio relaté par les japonais, écrit avec le sinogramme “jiang”, se rapproche du soja, le condiment à l’origine de ces bouillons. L’entreprise Ajinomoto Co., Inc. retourne à ces origines en travaillant le dashi. Pour cela ils reviennent à l’essentiel et le décortiquent.
Grâce à une conférence donnée à la Maison de la Culture du Japon à Paris le 21 janvier, pour laquelle je représentais Journal du Japon, on a pu découvrir la cuisine au dashi et son concept grâce au groupe Ajinomoto Co., Inc. Suivez le parcours et le travail de cette entreprise qui a fait de l’alimentation et la santé, un nerf de la guerre.
Aux origines, le bouillon riche et sacré au goût savoureux
Ce sont donc les chinois qui ont inventé et mis en place les plats en “bouillon”. C’est via leur image de la soupe que les japonais eurent l’idée de l’utiliser au départ pour les udon. Mais ce sont bien eux qui furent les premiers à établir un bouillon goûteux à base d’eau chaude. Les japonais ont ainsi réalisé leur propre version, tout en respectant leur religion, le bouddhisme, dans laquelle à l’époque la viande était proscrite par un précepte, afin de communier avec la nature. Il leur a donc fallu s’adapter pour s’offrir une soupe suave aux goûts riches et naturels. Ils ont ainsi mariés les saveurs que les produits de la nature leur offraient, en ajoutant des nouilles épaisses à la farine de blé tendre. Mais c’est bien le mariage de toutes les saveurs offertes qui offrent un bouillon au goût si riche.
Ajinomoto Co., Inc. poursuit cet idéal culinaire en cherchant à atteindre et à reproduire le plus simplement possible ce goût si généreux. Tout commença pour l’entreprise en 1907 lorsque le Dr Kikunae IKEDA découvrit le 5ème goût, le fameux umami, dans l’algue konbu, utilisée notamment pour réaliser un bouillon typiquement japonais : le dashi. Mais d’où vient réellement Ajinomoto Co., Inc. ? Cette entreprise mondiale, leader dans l’industrie agro-alimentaire est réputée pour offrir des mets sains et simples. Voyez plutôt la façon dont le docteur IKEDA caractérise leur travail : “Créer des condiments goûteux et accessibles, transformer des matières simples et nutritives en mets délicats.” Et en effet, depuis 1907, le groupe se voue à la recherche du “mieux vivre”, ce que leur slogan représente assez bien : “Bien vivre, bien manger”. En somme, leur but est de se servir de la nourriture pour aller mieux.
À la suite de son diplôme, le docteur Kikunae IKEDA (1864-1936) passa deux ans de sa vie en Allemagne, où en tant que scientifique japonais, il étudia les différentes saveurs que le Japon ne connaissait pas forcément (fromage, asperges, tomates, certaines viandes…). À cette époque, les scientifiques pensaient qu’il n’existait que quatre goûts : le sucré (offrant de l’énergie), le salé (pour les minéraux), l’amertume (qui passe pour un élément toxique) et l’acidité (une décomposition). Mais pour le docteur IKEDA, il existait forcément un autre goût non découvert encore. Un goût que les travaux d’un français, Jean Anthelme Brillat-Savarin, avaient mis en avant à l’époque.
Et c’est donc à son retour au Japon après des recherches approfondies qu’il découvrir un goût très agréable en bouche. Il le retrouva bien vite dans l’algue konbu, sous la forme d’un glutamate, un acide aminé (soit une protéine) présent dans certains aliments. Il le nomma comme vous le savez à présent umami. C’est à partir de là que tout commence, mais c’est par la découverte des travaux d’un confrère, le Dr. Hizu MIYAKE, que le docteur IKEDA prit sa décision d’allier goût et santé. Ce dernier indiquait qu’un aliment avec un bon goût favoriserait la digestion. IKEDA tenta alors d’isoler cette idée du glutamate pour en extraire un goût riche. Pour cela, il se rapprocha d’un certain Saburosuke SUZUKI, un producteur d’iode, pour créer une entreprise afin de commercialiser son idée du glutamate travaillé. Ils formèrent ensemble Suzuki Seiyakusho Co. qui deviendra Ajinomoto Co., Inc. en 1946.
Innovation, qualité, dégustation !
Vous l’aurez compris, le but de Ajinomoto Co. Inc. est d’améliorer avant tout la qualité gustative des plats japonais, et cela passe par l’innovation. C’est dans cette optique que le Docteur Hiroya KAWASAKI est venu donner une conférence à Paris le 21 Janvier dernier à la Maison de la Culture du Japon. Celle-ci portait sur la créativité de la cuisine japonaise au dashi et entrait ainsi dans un cycle de conférence sur la culture et l’innovation.
Le Docteur KAWASAKI a très vite rappelé que l’art culinaire japonais, le washoku, était classé depuis 2003 par l’UNESCO au patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Et Ajinomoto Co. Inc. permet de le mettre en valeur avec sa connaissance du goût et du dashi. Ce chercheur a toujours baigné dans la cuisine puisque son arrière-grand-père était cuisinier et possédait un restaurant de cuisine française. Mais bien qu’ayant grandi dans cet environnement, c’est bien l’aspect scientifique qui l’intéressait, afin d’étudier la cuisine dans son ensemble. Il s’est donc formé à la cuisine d’abord et à l’art du thé ensuite, avant de devenir chercheur. C’est par la suite qu’il rejoignit Ajinomoto Co. Inc. pour étudier les aliments.
Pour cela, lui-même et les autres chercheurs s’intéressent à un aliment à la fois. Ils vont le goûter, le chiffrer, le mesurer (température par exemple), et observer sa texture… Afin d’illustrer ce travail, KAWASAKI le compare à un maître sushi en plein travail. Il indique que la température pour manier le riz varie : celui-ci est à 39° contre 25° pour la main du maître sushi qui va le manipuler. Il estime donc que la meilleure température pour le travailler se trouverait dans cette fourchette, afin d’offrir le meilleur sushi possible.
Selon cette même conception du goût et de la recherche de la perfection, on pourrait aussi citer le bento. C’est un exemple représentatif fort de l’umami puisqu’il s’agit d’une succession de plats. Mais des plats sains et goûteux grâce à l’umami. On peut alors se poser la question : l’umami existerait-il uniquement au Japon, tout comme le dashi qui l’illustre ?
Ce qu’il faut garder en mémoire c’est que le dashi est présent dans plusieurs plats traditionnels japonais. Les takoyaki sont trempés dans un bouillon goûteux. Le hassun (le second plat) est travaillé avec des produits de la mer et de la montagne. Ainsi que le riz, les ramen (venus de Chine à l’origine mais à base de bouillon de poulet) et les udon (à base de bouillon sans substance animale)…
L‘alchimie subtile de ces ingrédients est importante pour les japonais. Car ils ont une cuisine à base de viande, de légumes et d’eau. Un assortiment qui existe aussi à travers le monde depuis longtemps, comme en France par exemple. Les accessoires ne seront pas les mêmes, mais le résultat oui. Ce qui en ressort n’est autre que le côté communautaire, l’envie de partager ce plat. L’exemple français le plus flagrant est le pot au feu. Son bouillon peut être utilisé ailleurs que dans le plat originel tout comme le dashi.
Ayant fait ce dossier pour Journal du Japon, je vous invite à lire la suite sur l’article original. Par ici > l’article sur Ajinomoto et le dashi.
Et revoici le site de la Maison de la Culture du Japon pour suivre toute leur actualité et le site de Ajinomoto pour les suivre en France, ainsi que la page facebook française officielle.
Merci !